Types de Menace:
Context
Le premier cas du nouveau coronavirus en Malaisie a été confirmé le 25 janvier 2020, bien que la transmission dans le pays ne se soit répandue qu’à la suite d’un rassemblement religieux à grande échelle à la fin du mois de février/début du mois de mars. À ce jour, la Malaisie a signalé 7059 cas confirmés et 114 décès. La crise sanitaire s’est déroulée dans le contexte de tensions politiques qui ont exacerbé les effets dévastateurs de la pandémie en entravant une réponse gouvernementale efficace. Comme l’a signalé un expert, la Malaisie fait en ce moment face à une « triple crise » (lien en anglais) : sanitaire, économique et politique.
Pour la première fois en Malaisie depuis plus de 60 ans, les élections nationales de 2018 avaient entraîné un changement du parti au pouvoir. En février 2020 - moins de deux ans plus tard - le gouvernement s’est effondré en raison de pressions économiques croissantes, de controverses politiques et de rivalités internes. Une nouvelle coalition a vu le jour et a été nommée comme gouvernement par le Yang di-Pertuan Agong (Roi). Cependant, la coalition est très instable et a été critiquée à l’intérieur et à l’extérieur du pays comme un « cheval de Troie » gouvernemental (lien en anglais) dépourvu de légitimité démocratique, comprenant plusieurs partis que les électeurs avaient rejetés lors des élections de mai 2018.
C’est dans ce contexte que le parlement malaisien a siégé pour la première fois cette année, le lundi 18 mai 2020, après que le gouvernement a reporté la session prévue début mars. Cette session devait comprendre un débat sur plusieurs motions importantes, notamment concernant des dépenses supplémentaires du gouvernement dans des programmes de stimulation économique pour amortir l’impact du coronavirus, ainsi qu’un vote de défiance contre le Premier Ministre Muhyiddin Yassin dans un contexte d’insatisfaction croissante.
Cependant, en citant la pandémie de COVID-19, Muhyiddin a
annoncé que le Parlement ne se réunirait que pour une journée avec un seul
point à l’ordre du jour : une allocution du Roi, en l’absence des médias, sauf
ceux de l’Etat.
Comme l’ont souligné des organisations régionales et internationales de droits humains, cette obstruction délibérée du Parlement pour contrecarrer un éventuel vote de défiance (lien en anglais) constitue une attaque frontale contre la démocratie malaisienne et a privé le peuple de ses droits à la représentation, à la législation et à la surveillance au moment où ils en ont le plus besoin
Perspective de PGA
Les parlements constituent une institution démocratique
indispensable. Lorsque leur capacité de réaliser leur mandat essentiel est
limitée, la santé de la démocratie elle-même est compromise. Dans les
démocraties, les assemblées législatives exercent des fonctions uniques de
représentation, de législation et de surveillance. Ce sont les mécanismes
institutionnels qui rendent la gouvernance représentative réelle au quotidien.
Est-ce qu’un Parlement siégeant une seule journée sans programme ou motion du gouvernement pour débattre d’une question précise, urgente et d’importance publique constitue une menace pour la démocratie parlementaire ? Le 18 mai sera à jamais gravé dans les annales de l’auguste Chambre comme le jour le plus sombre de la démocratie parlementaire en Malaisie. Hon. Kasthuri Patto
Membre du Comité exécutif de PGA,
Membre fondateur de l’Équipe parlementaire de réponse rapide (EPRR),
Membre de la Dewan Rakyat (DAP, circonscription de Batu Kawan),
Secrétaire internationale de Wanita au DAP
Le COVID-19 présente à la fois une épreuve et un test
décisif pour la démocratie. La pandémie a naturellement limité la capacité des
parlements du monde entier à remplir ces fonctions vitales. Dans de nombreuses
législatures, la nécessité de s’adapter a suscité des innovations qui
pourraient être maintenues après que la crise sanitaire actuelle se soit
calmée.
Depuis les Maldives jusqu’au Canada, les parlements - y compris ceux de nombreux autres pays du Commonwealth - continuent de se réunir à distance et de façon transparente, sous le regard « virtuel » des citoyens. Bien que ces sessions puissent présenter des défis techniques et souligner des inégalités d’accès à la technologie, elles démontrent un effort authentique de maintenir les responsabilités parlementaires.
Au contraire, la réduction par le gouvernement malaisien de la session parlementaire à une seule journée au cours de laquelle aucune affaire législative n’a pu être délibérée – même en ce qui concerne la question cruciale de la réponse et des précautions liées au COVID-19 – est une tentative de justifier une démarche inacceptable de miner la démocratie parlementaire en utilisant le coronavirus comme bouc émissaire.